Macron est-il légitime?

Tout d’abord j’ai envie d’expliquer ce qui m’a conduit à rédiger cet article. Je m’inflige quotidiennement de regarder un peu BFMTV et LCI surtout en cette période de mouvement social. Bien sur, j’ai mes limites et lorsque vient le moment des « parti pris » sur LCI, c’est le moment où je zappe sur BFMTV, parce que les « parti pris » sur LCI, c’est vraiment insupportablement orienté surtout sur les questions économiques on est clairement dans l’entre soi idéologique.
Hier soir, donc, une historienne était invitée en plateau sur LCI et lorsqu’elle dit que le socle électoral de Macron au premier tour est seulement de 20% des électeurs. Benjamin Duhamel lui saute littéralement à la gorge  » vous voulez dire que Macron n’est pas légitime? », elle tente de répondre, mais on entend des voix outrées derrière  » mais il est quand même arrivé en tête, il a fait plus que les autres ».

Pour ce genre de problématiques, l’oral ne me semble pas très adapté, alors posons les choses calmement par écrit.

Tout d’abord la légitimité est-elle imprescriptible?

Evidemment, non, puisque toute constitution inclut une procédure de destitution. On peut donc être légitime puisqu’on a été élu, mais perdre sa légitimité. Sinon, aucune procédure de destitution n’aurait été prévue.

La légitimité permet-elle tout?

Evidemment non. C’est pourquoi il y a dans les démocraties des contre pouvoirs et un conseil constitutionnel.

A la base, Macron est-il légitime?

Incontestablement oui, puisque, effectivement, il est arrivé en tête, et oui il a fait plus que les autres candidats, donc, constitutionnellement parlant, il n’y a pas de débat, à l’origine de son mandant, il est légitime.

On peut constater que tout le monde n’est pas aussi raisonnable que moi, et que même ce point reste discutable ( consulter ceci par exemple )

Une légitimité toute relative

Oui, sa légitimité est relative, dans la mesure, où , effectivement son socle électoral est seulement de 20% des électeurs, et , bien que notre constitution, à ce jour, fasse tout pour que le président ait une majorité à l’assemblée ( à quand la proportionnelle aux législatives?) , il ne dispose que d’une majorité relative à l’assemblée puisque le peuple souverain en a décidé ainsi aux dernières législatives.

On pouvait donc s’attendre, d’autant plus qu’il déclara le soir de son l’élection « votre vote m’oblige », qu’il gouverne mollo , avec du consensus, plutôt que comme un bulldozer comme lors de son premier mandat quand il disposait d’une majorité absolue de députés Godillots. Ainsi donc , il n’est pas légitime à passer en force, et c’est certainement là que se trouve son erreur principale. Il est donc légitime à gouverner mais pas à gouverner comme si la population était massivement favorable à l’orientation néolibérale qu’il affectionne tant.

Il aurait donc du gouverner, comme on gouverne dans la plupart des démocraties européennes. Et son parti qui affectionne tant d’invoquer les autres pays, dans lesquels l’age de la retraite à été reculé, dans lequel les prélèvements obligatoires et les taxes sont inférieures, cesse soudainement d’invoquer nos voisins lorsqu’il s’agit de méthode pour gouverner. En effet, partout ailleurs, on gouverne en construisant des coalitions, et en négociant préalablement avec les forces syndicales, on ne gouverne pas au bulldozer comme Macron en monarque absolu. Ainsi donc, si le président est légitime, sa méthode de gouvernance ne l’est absolument pas.

l’opinion, la foule et le peuple.

Lorsque l’opinion est massivement opposée à une contre réforme ( puisqu’il ne s’agit en l’espèce non pas d’une réforme, mais d’une contre réforme) malgré des mois de « pédagogie » et lorsqu’on n’a réuni que 20% des suffrages exprimés avec une abstention record, il faut tenir compte de cette légitimité tout à fait relative. Alors, certes, « la foule n’est pas légitime », mais dire que « le peuple s’exprime à travers ses élus » , est-ce pertinent lorsque les dits élus sont en place avec 52% d’abstention, et ne votent pas en tant que représentants du peuple, mais en tant que Godillots d’un parti? Que reste-t-il alors au peuple pour se faire entendre , à part la démocratie sociale, c’est à dire les grèves et les manifestations? S’il est entendable que lorsqu’un pouvoir est totalement légitime comme à l’époque de Raffarin ce ne soit pas « la rue qui gouverne », cet argument est-il entendable aujourd’hui? Que cherche ce pouvoir ? Nous pousser à l’insurrection ?

De l’extrême gauche

Hier soir toujours, on entendit notre ministre de l’intérieur nous faire part des remontées du terrain, les émeutiers blackblockesques qui commettent des exactions ont été clairement identifiées, ils sont d’extrême gauche ! Ainsi donc l’extrême gauche reprend enfin sa véritable identité dans la bouche de Darmanin, ce sont les révolutionnaires, qui veulent « mettre à bas la république », et « tuer du flic », bien, mais on ne comprend plus vraiment alors pourquoi depuis des mois on nous bassine cette idée que la NUPES serait l’extrême gauche ? La NUPES est-elle révolutionnaire? appelle-t-elle à « mettre à bas la république », et « tuer du flic », les députés NUPES sont-ils à côté des émeutiers en train de balancer des pavés sur la police et de mettre le feu partout ?

Merci donc, Monsieur Darmanin de nous rappeler enfin que la NUPES n’est pas d’extrême gauche, qu’elle n’appelle ni à la révolution, ni à l’insurrection. Puisse Ruth Elkrief vous entendre et cesser de désinformer comme elle le fit avant hier sur l’antenne de LCI en disant qu’il fallait à tout prix préserver un bloc politique centriste au pouvoir afin d’éviter que les extrêmes ne gouvernent demain.

ça suffit le foutage de gueule, la NUPES, c’est la gauche modérée et républicaine, l’extrême gauche, on la voit en ce moment faire dégénérer les manifestations en mettant le feu partout et on caillassant la police. On peut par exemple citer Jean Luc Mélenchon à qui on demandait au lendemain de l’élection s’il considérait Emmanuel Macron comme un président légitime « bien entendu, nous sommes républicains, et nous reconnaissons le verdict des urnes ». Cette phrase seule l’exclut du champ de l’extrême gauche.

les exactions

On entend en boucle depuis le soir du 49.3 et les rassemblement spontanés, que sont commises des « exactions ». Peut-être, comme moi, avez vous alors pensé à l’armée russe en Ukraine, à Boutcha, aux exécutions sommaires, aux viols, à la déportation des enfants. Du coup je suis allé consulter le Larousse on y trouve deux définitions : « Actes de violence, sévices commis à l’égard d’une population » et « Action d’exiger ce qui n’est pas dû ou plus qu’il n’est dû. » Je laisse à chacun le soin de méditer pour savoir si ce terme « d’exaction » est adapté pour le camp des manifestants qui incendient des poubelles ou pour le camp des policiers qui interviennent sur ces manifestants. Car enfin, qu’exigent ceux qui manifestent contre l’usage du 49.3 depuis une semaine? si ce n’est leur « dû » c’est à dire plus de démocratie plutôt qu’une crise constitutionnelle.

Protéger des biens justifie-t-il des blessures corporelles?

Je conclurai avec ce questionnement. Lorsque le pouvoir décide d’enclencher des nasses, des charges, du gazage, du matraquage pour protéger des vitrines ou du mobilier urbain, il décide d’exposer à la fois les gens qui sont là et qui peut-être n’ont rien cassé, ni rien brûlé, mais aussi les policiers. On se retrouve alors avec des mains arrachées, des yeux détruits, des traumas crâniens, des dentitions qui volent en éclat des deux côtés. Est-ce bien raisonnable? Une vitrine, ça se change, un mobilier urbain aussi, des biens matériels au fond, ce n’est pas si grave. Par contre quand on a perdu une main, un oeil, des dents ou qu’on se retrouve à vie avec des crises d’épilepsie suite à un trauma crânien, ça , c’est irréversible. Alors, ne faudrait-il pas attendre que des vies soient menacées, des gens molestés avant d’intervenir par la force légitime de l’état?

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